PISTES DE ZAMBIE ET MALAWI


C’est donc un samedi d’été, le 16 juillet pour être précis, au moment où nombre de français prend la route vers le sud. Le jour du grand départ est enfin arrivé : je vais revoir l’Afrique Australe après une courte infidélité. C’est aussi un jour de canicule. Et pourtant il va bien falloir porter le sac : l’occasion de prendre une bonne suée pour commencer, d’autant plus qu’il faut partir sur les coups de midi, direction la station RER la plus proche. Croix de Berny devient synonyme de voyage alors je m’en accommode ! Et c’est parti pour une heure de RER : on en vient à s’interroger sur l’absence de climatisation dans ces trains. La canicule se fait bien sentir, et la suée continue ! Heureusement que l’aérogare 2F de Roissy est frais, lui. D’ailleurs pour une première visite, je le trouve particulièrement agréable avec ses larges allées et sa luminosité exceptionnelle.

La première étape, ou plutôt saut de puce, doit me conduire jusqu’à Amsterdam Schipol. Et premier couac : le sac est trop lourd d’un petit kilo. Il faut rapidement prendre une décision devant la banque d’enregistrement pour transférer quelque chose dans le sac à dos. C’est bon, ça passe avec quelques centaines de grammes de marge ! Visiblement aucune tolérance n’est à attendre à Paris ! Seconde interrogation, je n’aperçois toujours pas les deux personnes qui sont sensées faire partie du groupe. Je voyagerais donc seul et nous nous retrouverons sur place. Une quarantaine de minutes à bord d’un Boeing 737 de KLM qui me permet de découvrir la Hollande, ses polders, ses digues et ses milliers de canaux. L’occasion aussi de découvrir que les néerlandais sont fâchés avec la gastronomie : un genre de sandwich au poulet avec du pain aux raisins, tout ça à 16h30 ! Sans façon ! Espérons tout de même que l’alliance Air France KLM changera ce détail !!

Arrivé à Schipol, une longue attente commence. En effet, le prochain vol ne décolle qu’à 20h40 et je n’ai pas la tête à faire les boutiques dans cette immense aérogare. Et toujours pas de trace d’autres clients d’Atalante. Pour me rendre à Nairobi, ce sera un Boeing 777 de Kenya Airways, paré de rouge. Pendant de longues minutes je rêve de me retrouver seul sur les trois sièges comme la dernière fois ; mais au tout dernier moment, je suis rejoint par deux voyageurs. Ce n’est pas Noël à chaque voyage ! En revanche, je suis très agréablement surpris par l’équipage (souriants et joliment vêtus) et l’équipement de l’avion : siège plutôt large, repose-tête réglable, et même écran individuel avec un choix très varié de programmes. Malgré tout, il reste difficile d’y dormir ! Heureusement que le vol ne dure qu’un peu plus de 7 heures !! A quatre heure du matin, c’est déjà le clairon pour le p’tit dèj et aussi le temps de se dégourdir les jambes.


Dimanche 17 juillet, Nairobi

Nairobi Jomo Kenyatta, un aéroport épuisant. Surtout quand on y arrive à court de sommeil. Il est carrément petit, peu de place pour s’asseoir si ce n’est au sol et très peu d’information. Il vaut mieux tendre l’oreille plutôt que fixer les panneaux d’information qui restent désespérément muets. Pourtant il s’agit d’un des plus importants aéroports de la région ! Par contre, j’ai eu l’heureuse surprise de découvrir que les annonces étaient faites en français, idem pour les films à bord. Cela fait plaisir d’entendre la langue de Molière loin de chez soi. Mais je ne m’explique pas la raison de l’emploi dans notre langue à cet endroit qui ne fut jamais sous influence française.

Enfin, je finis par trouver mon avion ; mais surprise, nous passons par Lusaka au lieu d’aller directement à Lilongwe. Je dois reconnaître que j’ai été un moment inquiet de ne jamais arriver au Malawi même si le numéro de vol était le bon ! Heureusement que le Boeing 767 est presque aussi bien équipé que son grand frère. Après une bonne pause sur le tarmac de Lusaka, le temps de débarquer les arrivants, nettoyer la cabine, embarquer les partants et le fret, et nous voilà en fin partis jusqu’au terminus. Une petite heure de vol jusqu’à Lilongwe au Malawi. Désormais, j’étais certain qu’il n’y avait pas d’autre membre du groupe dans cet avion.

Enfin arrivé ! Ouf ! Cela fait tout de même quatre vols dans trois avions ! On dit que les voyages forment la jeunesse, on verra bien ! Les formalités sont réglés plutôt rapidement hormis le double contrôle des bagages à la sortie (attention, la douane et la sécurité, c’est pas pareil, mais faute d’uniforme ….). C’est aussi la première fois depuis que je viens en Afrique qu’on contrôle mon carnet de vaccinations international. Arrivé dans le hall, c’est la cohue et le brouhaha mais pas de trace de panneau Atalante. Me serais je trompé ? La journée « galère » continuerait-elle ? Non, c’est Béatrice Bouyssel qui me reconnaît. Aurais-je une bonne tête de français ? Il faut croire ! Dehors nous retrouvons Inno, plus exactement Innocent selon son état civil, d’origine zimbabwéenne ! O surprise, elle est de Toulouse. Le monde est décidément si petit ! Elle a même poussé le vice jusqu’à laisser les 4*4 immatriculés en Haute-Garonne (j’apprendrais plus tard que cela  facilite les formalités administratives et douanières ; point donc de chauvinisme exacerbé !). Je me croirais presque à la maison, la végétation mise à part. Ces deux Toyota Land Cruiser seront désormais comme nos maisons pour la quinzaine à venir. Tout est à bord : vivres, eau potable, et tout le matériel de camping.

Une petite demi-heure après moi atterrit l’avion des filles que j’ai tant cherchées depuis le départ. Il s’agit de Christiane, la parisienne, et Rebecca, l’alsacienne. Je comprends enfin que je ne risquais pas de les croiser : elles sont arrivées par Johannesburg, je ne risquais donc pas de les croiser ! Nous rejoignent ensuite Pierre et Henri, deux photographes chevronnés, arrivés au Malawi deux jours plus tôt. Nous sommes à embarquer, direction la frontière zambienne. Cette liaison nous permet juste de découvrir une flore et des cultures diverses (manguiers, papayers, canne à sucre, manioc, …), et aussi de nombreux gens au bord des routes souvent très souriants. Le passage des deux postes frontière se fait vraiment très tranquillement (nous prenons même un fou rire mal venu à les voir s’acharner sur le tampon alors qu’il n’y a quasiment plus d’encre !!). Nous parvenons finalement à notre premier camp, Mama Rula’s camp site, près de Chipata, un nom qui me fait de suite penser au célèbre alcool local, l’Amarula ! Ce soir, ce sera un camping, une fois n’est pas coutume ! Et en plus, sur un épais lit de verdure !
Nous découvrons aussi le grand luxe : une tente igloo trois places pour une personne, un épais matelas, et même deux tables de jardin pour prendre nos repas. Que demande le peuple ? Il y a même le petit Ricard (on ne renie pas ces origines, même en Afrique ! ). Cette première soirée est l’occasion pour nous de partager nos expériences de voyages, et pour nos guides de nous passer diverses consignes de base pour que tout se passe bien en brousse.
A 21 heures, nous courrons dans les bras de Morphée sans difficulté après 24 longues heures de voyage. Mais avec cette nuit fraîche, il fait bon dans son duvet. Demain, l’aventure, la vraie, commence.
 
Lundi 18 juillet, Chipata

6 h du mat’ : nous avons déjà pris le rythme africain. La journée commence avec le premier petit déjeuner en terre d’Afrique. Le camp est rapidement plié et vers 7h30 nous repartons en direction de la vallée de la Luangwa, au nord est du pays. En quittant le camping, nous repassons devant un immense entrepôt de coton ; celui-ci est collecté dans tous les petits villages puis stocké en balles avant l’expédition vers l’étranger. Très rapidement, nous abandonnons la route bitumée pour une piste en latérite plus ou moins défoncée. Voici l’Afrique comme on l’aime avec le rouge de ses pistes, le vert et le jaune de sa végétation. Nous croisons de nombreux gens : les enfants qui partent à l’école, les femmes de corvée d’eau ou de bois, et aussi énormément de cyclistes. En fait, les gens se regroupent dans les « gros » villages pour y faire leur marché. Les sourires sont nombreux ! Les zambiens semblent vraiment être un peuple accueillant. Ceci se confirme lorsque nous nous arrêtons pour acheter des petites bananes succulentes. Ici, quasiment pas de mendicité. Les enfants approchent juste pour s’amuser et nous montrer les camions qu’ils ont fabriqués à l’aide fil de fer. C’est vraiment très réaliste : il y en a même un qui a son chargement de coton. Puis nous reprenons la piste découvrant de ci delà quelques baobabs. En descendant vers la vallée, la végétation change (les palmiers apparaissent et la terre est plus jaune).

Arrivés tout prêt du parc national de la South Luangwa, le spectacle commence (qu’est ce que ça va être à l’intérieur ?). D’abord, une famille de babouins, avant que nous passions devant une lagune fourmillant de nombreuses espèces d’oiseaux. Quelques centaines de mètres de plus et ce sont deux jeunes mâles éléphants assez stoïques. Chacun s’observe. Le voyage s’annonce sous les meilleurs auspices !

Nous installons notre campement au bord de la rivière Luangwa juste avant l’entrée du parc, dans ce qui fut dans le passé le Lukonde Camp, aujourd’hui à l’abandon. Seule la maison du gardien ainsi que deux cases sont encore debout, nous permettant de bénéficier de la douche. Avant toute chose, nos yeux sont attirés par la rivière : une cinquantaine d’hippopotames y sont installés sur les bancs de sable. A cet endroit là, la rivière n’occupe environ que la moitié de son lit avec un niveau plutôt bas. Le spectacle est prenant. Quelques ibis sacrés emplumés de noir et de blanc (le blanc pour le corps, le noir pour la tête, les pattes et la queue) pêchent tranquillement. Un martin-pêcheur tournoie au-dessus de nos têtes… Autant dire que nous installons tous nos tentes en « terrasse » avec vue sur l’eau, juste sous les arbres. Le repas est bien évidemment entrecoupé d’observations, surtout lorsqu’un éléphant apparaît sur l’autre rive pour son propre repas. Qu’il est agréable de prendre son temps ainsi ! Et puis un repas froid ne risque pas de refroidir !! En attendant l’heure de la ballade, nous nous installons sur notre promontoire face au gros du troupeau d’hippopotames et nous les écoutons grogner. Un jeune nous gratifie même d’un joli bond en arrière apeuré qu’il est par un crocodile ! Finalement, c’est plus agile qu’il n’y paraît ces bêtes-là ! Changement de place, une troupe d’éléphants vient se désaltérer face au campement : cinq femelles et trois jeunes dont un tout petit, adorable mais encore gauche. Ainsi s’écoulent les minutes en attendant l’heure du départ.

Mais quelques minutes avant le départ, c’est dans le lodge situé juste à côté de notre campement que se déroule le spectacle : cinq éléphants ont investi les lieux. Les bipèdes se réfugient sous les tables. Pendant ce temps, la matriarche s’occupe de « ranger » les verres. Finalement, à force de bruit, ils finissent par les faire partir, tandis que nous nous dirigeons vers le pont, unique accès au parc national de la South Luangwa, la limite nord étant constituée par l’escarpement  de Muchinga ; les clôtures sont donc inutiles.

Les premiers animaux rencontrés sont, comme souvent, des impalas. Ils sont rapidement rejoints par de nombreuses troupes de pukus (aussi appelés cobes de Vardoni), d’un brun monocolore, à l’aspect soyeux. Les larges étendues libres semblent réellement leur plaire. En bordure des clairières apparaissent régulièrement des cobes à croissant, de solides antilopes à la fourrure épaisse (pour pouvoir aller dans l’eau), de couleur grise, reconnaissables au croissant blanc ornant leur postérieur. De temps en temps, un guib harnaché (une autre antilope, bien plus petite, marron, tachetée de blanc) craintif nous croise mais jamais très longtemps Il ne sera pas facile de le fixer sur la pellicule. Cet après-midi nous longeons la rivière vers le nord ainsi que ses lagons (des méandres semi asséchés). Nous avons donc l’occasion de voir diverses espèces d’oiseaux : la très présente et très bruyante oie d’Egypte que nous apprendrons à reconnaître tellement nous l’entendrons, l’ibis Hagedash, magnifique volatile noir dans la lumière avec ses flancs aux teintes vertes et le dessus de son bec rouge. Un martin-pêcheur géant, dans sa livrée noire tachetée de blanc, son cou roux et son bec solide,  nous fait même l’honneur de rester sagement sur sa branche. De nouveau, des ibis sacrés qui deviennent déjà classiques pour nous ! C’est un des premiers oiseaux que nous ayons mémorisés ! Quelques phacochères broutent, agenouillés comme toujours !

De retour au bord de l’eau, nous descendons des véhicules pour profiter du spectacle (chut, faut pas le répéter, ce n’est pas sensé être autorisé !). Les rives sont peuplées de crocodiles ; une colonie de cigognes à bec jaune semble dormir, dérangée par une paire de spatules et leur bec si reconnaissable. Quelques hippopotames prennent un bain. Sur notre gauche, deux jabirus (cigogne du Sénégal) immatures font leur apparition. Les jumelles deviennent alors un instrument précieux. Le soleil qui commence à décliner nous offre de magnifiques reflets sur la Luangwa. Le rocher accueillant un héron cendré se révèle être le dos d’un hippo ! Sur la piste du retour, nous croisons encore de nombreux cobes, impalas et pukus jusqu’à ce que nous tombions sur des éléphants, d’abord une troupe lointaine, puis deux femelles aux mamelles remplies qui semblent énervées par notre présence, pressées qu’elles semblent être de retrouver leurs petits ; puis de nouveaux deux femelles sur une piste annexe. Voici une après-midi bien remplie. Nous faisons une dernière halte sur le pont avant de rejoindre le campement : les premiers hippopotames commencent enfin à sortir de l’eau et font preuve d’une certaine agilité sur la terre ferme.

La journée se termine d’abord sur une bonne bière fraîche zambienne, offerte par Béa, avant un bon repas au clair de lune puis une veillée autour du feu. La nuit débute avec le chant (ou plutôt le grognement) de nos voisins hippos. Et cela va durer toute la nuit, et accessoirement tout le voyage !! Ca craque, ça chante, ça grogne….. Apparemment, des éléphants nous ont rendu une visite nocturne ; ils ont piétiné les herbes sèches tout près de la tente de Béa. De même, plusieurs hippopotames seraient passés derrière nos tentes. Moi je suis resté au fond de mon duvet !
 
Mardi 19 juillet, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

Dès les premières lueurs de l’aube, tout le monde est levé, surtout ceux qui se sont levés nuitamment pour observer les visiteurs. Après un petit déjeuner rapidement avalé, nous retournons dès 6h30 dans le parc dans l’espoir de voir quelques prédateurs de retour de chasse. Malheureusement, nous en sommes pour nos frais. Pas l’ombre d’une bête pendant la première heure. La fraîcheur matinale les dérange. Il y a bien de ci, delà quelques éléphants tapis dans les sous-bois, quelques oiseaux pour passer le temps. Nous en profitons donc pour nous enfoncer vers le sud du parc.

Petit à petit, quelques groupes d’impalas commencent à apparaître dans les rayons de soleil. Dans une petite mare qui ne paie pas de mine, recouverte qu’elle est de salades d’eau, nous apercevons d’abord le dos d’un hippopotame prenant tranquillement son bain, tandis qu’un Jabiru, une grosse cigogne noire et blanche avec son bec bariolé de jaune, de rouge et de noir, lui tourne autour, tentant désespérément de pêcher quelque chose ! Nous sommes comblés, quand, à la recherche d’une mare, qui se révèle finalement asséchée, nous tombons sur un couple de lions. Ils dorment paisiblement ou plutôt ils récupèrent ! C’est la saison des amours. Pendant notre heure d’observation, nous aurons la chance de les voir s’accoupler deux fois ! Mais l’arrière-plan est tout aussi intéressant : un impala mâle ayant repéré les deux fauves, au demeurant bien peu intéressés, fait un large détour discret pour rejoindre son groupe ; quant aux phacochères au loin, ils vaquent à leurs occupations sans même soupçonner la présence des félins.

Un peu plus loin, c’est une girafe de Thornycroft, espèce endémique au parc, qui nous barre la piste, mâchouillant tranquillement quelques feuilles. A y regarder de plus près, à travers les feuillages, ce sont des paires de pattes et des queues qui apparaissent ! Elles sont finalement quatre à parader en contrebas de la piste. On peut les reconnaître à leurs taches plutôt sombres et au fait que leurs pattes sont claires, du pied au genou, comme si elles portaient des chaussettes ! Nous poursuivons notre boucle jusqu’à apercevoir quelques éléphants  tentant de traverser la piste. Nous les laissons faire et rebroussons chemin jusqu’au trou d’eau tout proche, lui aussi entièrement recouvert de verdure. Tous les points d’eau, hormis la rivière, sont ainsi recouverts. Ce ne sont d’abord que quelques pintades casquées, reconnaissables à l’excroissance bleue sur leur tête, et un petit varan, d’une quarantaine de centimètres, qui nous occupent. Avec un peu de patience, nous voyons arriver notre troupe de pachydermes. Un groupe de six individus vient se désaltérer. Et bien évidemment, le plus petit fait le spectacle. Toutes oreilles déployées et trompe tendue, il fonce vers les pintades en leur soufflant dessus. Sûrement un petit mâle qui veut s’affirmer. Le varan n’avait pas demandé son reste dès leur arrivée en se réfugiant sous le bosquet voisin. Après leur départ, c’est le tour de trois phacochères de venir boire, agenouillés, évidemment. Enfin, nous repartons car la mi-journée approche.

En chemin, nous tombons sur de nombreux zèbres ainsi qu’un grand koudou mâle paisiblement installé à l’ombre d’un arbre. Dommage, une de ses cornes est cassée presque à la base. Plus loin encore, nous dévorons des yeux une femelle babouin : tout simplement à cause de son petit qui nous fait craquer, un coup sur le dos de sa mère, un coup pendu sous son ventre, une autre fois courrant derrière elle et tentant de lui grimper dessus. Décidément, c’est l’heure de rentrer : nous manquons de percuter une éléphante et son tout petit, surgis de nulle part à travers cette dense végétation.

De retour au campement, nous retrouvons la colonie d’hippopotames qui est de retour et Béa qui était de garde, pour parer les incursions des babouins et vervets. Après une bonne salade d’été bienvenue, nous profitons de la pause pour prendre une bonne douche, elle aussi bienvenue ! Certaines bouquinent, d’autres photographient, d’autres encore observent. C’est comme cela que j’aperçois un nouveau Jabiru mais beaucoup plus sale et donc moins flamboyant que les précédents. On devient vite difficile !

15 h arrive et nous repartons pour le safari de l’après-midi. Nous nous dirigeons à nouveau vers le sud du parc mais cette fois-ci en essayant de longer au maximum la rivière. C’est là que les chances sont les plus grandes de faire des rencontres, près de l’eau. Nous commençons par traverser une épaisse forêt dans laquelle la piste s’enfonce comme dans un tunnel végétal. Ces forêts alternent avec de plus ou moins larges étendues dégagées et verdoyantes qui font le bonheur des ruminants. Ils voient ainsi arriver leurs prédateurs de loin. Nous apercevons régulièrement des troupes d’impalas ou de pukus, qui sont magnifiques dans cette lumière chaude et pure : leur robe est encore plus soyeuse.

C’est donc à l’abord d’une de ces étendues que nous apercevons devant nous un couple de calaos géants terrestres, tout noirs avec leur face rouge. Les autres calaos, bien plus petits, sont ridicules à côté ! Mais on a du mal à imaginer ceux-ci en vol tellement ils sont gros. Et puis, en levant les yeux, nous discernons une girafe en train de s’alimenter sur un petit arbre. Quelle n’est pas notre surprise, en approchant très silencieusement, de découvrir qu’il y a en fait une nurserie. Trois girafons sont là dont le plus jeune a peut-être un mois. Il découvre le monde et inspecte prudemment le merle métallique qui l’approche. Ces trois-là sont adorables, « assis » par terre au bord de la piste. Puis une femelle remonte de la rivière et les rejoint. C’est l’heure de la tétée pour un des trois. Vient ensuite une seconde femelle et un mâle, toujours du même endroit : deuxième allaitement. Le mâle poursuit pour aller chercher la première femelle près de son arbuste et la ramener dans le groupe. Comment ne pas craquer devant un tel spectacle offert par une nature préservée ? Nous restons là une bonne heure à profiter de ces instants magiques.

Mais il faut bien poursuivre ! C’est au bord de la rivière que nous trouvons une sorte de promontoire naturel juste en surplomb d’un groupe d’hippopotames. Là encore, grand spectacle. Au départ, tous vautrés lamentablement sur a plage, il ne faut qu’un cri du « chef » pour que la troupe  s’ébroue au pas de course direction la rivière. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, il n’y a quasiment plus trace de leur présence, si ce n’est quelques narines qui dépassent à la surface ! C’est alors que deux mâles décident de se mesurer. Les gueules s’ouvrent largement, les canines s’entrechoquent, et les appareils photos crépitent. Un assaut puis un second, et puis tout se calme à nouveau, comme souvent chez les hippos, tout ceci éclairé par une lumière qui devient rasante.

Un peu plus loin, nous retrouvons notre famille de girafes (et dire qu’elles ne sont que 300 de cette espèce ; nous en avons déjà vu une dizaine aujourd’hui ! Nous sommes vraiment chanceux). Alors que la lumière baisse, c’est une troupe de cobes à croissant qui clôture notre très belle journée. Retour au campement pour un bon repas et un café siroté autour du feu, désormais devenu traditionnel pour nous. Et une nuit des plus calmes, du moins pour moi qui n’aie rien entendu !! Finalement, les nuits africaines me réussissent bien ! En revanche, je ne risque pas d’apercevoir nos visiteurs nocturnes. J’écouterais le récit de la nuit demain au petit-déjeuner !
 
Mercredi 20 juillet, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

Nous commençons à bien prendre le rythme : pas besoin de réveil, tout le monde est levé en avance. Un petit déj’ vite avalé et en route pour de nouvelles aventures. Assez rapidement, après avoir dépassé Mfuwe Lodge, nous tombons nez à nez avec quelques buffles campés au beau milieu de la piste. Nous approchons au ralenti pour éviter de les brusquer. Mais nous ne nous doutions pas de la suite. A gauche comme à droite, des buffles à perte de vue aussi loin que notre regard peut porter. C’est réellement impressionnant et on se sent tout petit devant cette masse. Il y a d’adorables bufflons avec leurs « embryons » de corne qui tètent encore à leur mère et de gros mâles magnifiquement casqués. Ils sont peut être plus de quatre cent à se déplacer comme un seul buffle, probablement vers un point d’eau. Le spectacle est fascinant dans la lumière crue du matin, avec la poussière soulevée. Prudemment, nous traversons le troupeau et tentons de les suivre : nous sommes toujours sous surveillance, les mâles veillent au grain. En chemin, deux jeunes mâles s’affrontent, tête contre tête. Finalement, nous parvenons au bord d’une lagune. C’est là que certains tentent de se désaltérer dans un mince filet d’eau. Quel moment magique offert par ce troupeau. Après tous ces embêtements, nous les laissons tranquilles et nous dirigeons à travers les espaces ouverts vers les bords de la rivière.

Pukus et impalas sont de sortie en grand nombre, quelques zèbres flânent ici et là. En fin de matinée, ce sont les cobes à croissant qui refont leur apparition. Tous ces ruminants se régalent sur les berges herbeuses de la Luangwa. Une dizaine de vautours attirent notre attention au sommet des arbres mais impossible de découvrir leur cible. Nous nous rabattons donc sur les petits oiseaux aux couleurs chatoyantes : d’abord des guêpiers malheureusement à contre-jour, des inséparables verts, au doux chant mais impossible à fixer sur la pellicule, puis par deux fois un magnifique rollier à longs brins qui semble prendre la pose d’abord sur une branche puis au bord de la piste. Voici un oiseau magnifique avec tout ce mélange de couleurs ; on croirait la palette d’un peintre : son ventre lilas qui se dégrade ensuite en une série de bleus, sa tête aux teintes vertes, ses sourcils blancs, …. Et que dire de ce merle à longue queue dont on croit qu’il est tout noir. Mais une observation aux jumelles permet de découvrir de superbes reflets bleus violets qui changent à chaque fois qu’il bouge par rapport au soleil. Que la nature est artiste, tout de même !

Le long des berges, c’est d’abord deux têtes de girafes au loin qui attirent notre attention avant que nous passions dans une forêt d’ébènes : calme, ombre et douceur !! Au sortir de cette zone arborée, nous avons la surprise de découvrir une vingtaine de zambiens en train de jouer au foot sur la rive opposée : on pourrait rêver pire comme cadre ! Pas besoin de grand stade tout compte fait. Sur le chemin du retour, nous tombons à deux reprises sur un groupe d’éléphants, d’abord dans le parc avec un gros mâle pourvu de belles défenses, puis à l’extérieur, juste avant le camp : ils sont une bonne quinzaine à manger tranquillement. Peut être ceux qui nous rendent visite tous les soirs ? Il faudrait leur demander !

La pause de la mi-journée nous permet de profiter de la douche sommaire mise à notre disposition au camp ; certains écrivent, d’autres lisent, d’autres encore cherchent le cliché parfait. Les heures chaudes de la journée sont consacrées au farniente. Mais à 15 h, branle bas de combat. Nous repartons, direction le nord en longeant, là encore, au maximum la rivière. Les rencontres sont pendant un bon moment assez rares : quelques ruminants disséminés dans les hautes herbes ou les sous-bois, un éléphant qui traîne en bord de piste, quelques phacochères impassibles ou encore divers oiseaux bien dissimulés dans le décor : les jumelles sont alors indispensables pour les distinguer.

Et puis, plus tard, Béa nous conduit à une nouvelle lagune, bien plus grande que les précédentes. Sa surface est quasi entièrement recouverte de salades sauvages aquatiques. Il est facile d’imaginer que c’est le paradis des hippopotames. Seuls leurs yeux et leurs narines émergent de cette immensité verte. Il y a aussi de nombreux jacanas, jeunes et adultes, qui démontrent leurs prouesses pour la marche sur l’eau : un vrai ballet. Souvent un dos d’hippo sert de rocher à un jacana ou à un ibis sacré. Encore un endroit merveilleux ! En contournant la lagune, nous trouvons un autre point de vue nous permettant d’apprécier les évolutions de ces mastodontes. Quelle n’est pas notre surprise d’assister à un accouplement. On ne voit, en fait, que le mâle qui se redresse hors de l’eau, grimpé qu’il est sur la femelle, contrainte pour sa part, à rester sous l’eau. C’est tout juste si il lui laisse le temps de remonter respirer !! Et cela dure, dure, dure, … Quelques jeunes prennent des leçons à s’approchant de très près. Ou alors jouent les curieux ? Encore une fois aujourd’hui, nous avons la chance d’assister à un moment rare. Nous avons aussi pu remarquer leur comportement lorsqu’un grognement part. Ce n’est au départ que le fait d’un seul individu mais immédiatement tout le groupe répond, ce qui peut provoquer un joyeux tintamarre pour de grands groupes !!

En rentrant tranquillement, nous tombons sur deux très jeunes éléphanteaux seuls dans les hautes herbes. Bizarre !! Et surtout méfiance, il ne faudrait pas se faire charger par la mère. Nous ne nous éternisons donc pas. Plus loin, juste en face du camp, nous retombons sur un autre groupe qui attire notre attention par le barrissement d’un gros mâle. Béa se rend compte que nous assistons à un rituel amoureux : ce mâle est en plein must. La femelle fait tout ce qu’elle peut, en venant se frotter, pour aguicher et exciter le mâle. Malheureusement, cela ne se fera pas tout de suite. Sinon, nous aurions eu droit à deux accouplements dans la même après-midi.

L’heure de fermeture du parc approche et nous devons partir. Mais décidément, il est écrit que c’est la journée des éléphants. A quelques centaines de mètres du pont, nous sommes bloqués par un barrage d’éléphants. D’abord une mère et son petit, puis une seconde femelle sont installés au milieu de la piste pour déguster un acacia sur le bas-côté. Ce sont finalement quatre véhicules qui se retrouvent bloqués. Et dans ce cas-là, il faut attendre que les mastodontes se décident à bouger. Inutile de tenter de forcer le passage, ce serait une charge assurée. Ils sont sympas car nous n’aurons finalement que dix minutes de retard à la grille ! Inno doit se demander ce qui nous arrive, lui qui est resté de garde au campement.

Pendant le repas, en pleine obscurité, nous avons encore la chance d’observer une troupe d’éléphants progressant au milieu de la rivière, sur les bancs de sable, en plein territoire hippo. C’est vrai qu’on manquait de pachydermes à cet endroit !
 
Jeudi 21 juillet, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

Dernière journée dans le parc. Le planning est immuable. Encore une bonne nuit de sommeil : impossible de dire si nous avons eu des visites nocturnes. Dès la barrière passée, à peu près là où nous les avions laissés hier soir, nous retrouvons une famille d’éléphants. Un des jeunes nous fait même face sur le bas-côté. Nous pouvons ainsi admirer sa technique et l’extrême dextérité de sa trompe pour attraper les herbes et les nettoyer en les secouant. Nous nous enfonçons ensuite vers le sud du parc. Ce matin, les animaux sont rares, nous profitons donc de la variété des paysages ; un nouveau s’offre à nous : de larges étendues sablonneuses au milieu de la verdure, un peu comme des lits de rivières asséchées. On y distingue très bien les traces des différentes espèces, en particulier les chemins d’hippos. Nous empruntons aussi de nombreuses pistes étroites cernées de hautes herbes qui commencent déjà à jaunir. Et pourtant, nous sommes en hiver ….. austral. Dans les espaces dégagés, nous retrouvons inévitablement l’ensemble des ruminants. Lors de nos incursions sur les berges, nous tombons systématiquement sur des groupes d’hippos ainsi que de respectables spécimens de crocodiles du Nil. Nous en verrons d’ailleurs un, au bord d’un trou d’eau, totalement recouvert de salades !! Et que dire de cet adorable puku d’à peine deux semaines en train de téter sa mère pendant de longues minutes, tout ça au bord d’une piste. Une longue matinée consacrée aux paysages. Nous verrons bien ce que ce dernier après-midi va nous réserver.

15 h marque le départ du dernier safari dans le parc de la Luangwa. Nous allons essayer d’en profiter au maximum. A force, nous reprenons des pistes connues mais peu importe. L’essentiel est ailleurs : profiter des paysages, de la nature protégée, regarder les animaux évoluer en toute quiétude. Hormis les prédateurs, tout le monde est au rendez-vous, même si certains dans le groupe sont blasés et attendent le léopard … qui ne viendra pas. Nous nous émerveillons devant un groupe d’inséparables verts qui sont décidément bien plus à l’heure place ici sur un bosquet plutôt que dans une oisellerie en Europe ! Nous retrouvons ensuite trois beaux mâles koudous, joliment cornés. Un peu plus loin, nous tombons sur une sorte d’arche de Noé. Cette prairie verte accueille de nombreuses espèces. Babouins, impalas et pukus s’alimentent çà et là tandis qu’un groupe d’éléphants traverse le décor. Deux jeunes mâles impalas jouent les durs en s’affrontant cornes contre cornes. Sur la gauche, à l’orée du bois, c’est un groupe de mangoustes rayées qui batifolent. Le Jabiru cherche, imperturbable, de quoi s’alimenter. Et tout ce petit monde vit en harmonie. Petite exception de l’après-midi, nous réussissons à trouver un bout de rivière sans hippopotames : si, si, cela existe.

Sinon, nous nous retrouvons coincés par deux éléphants sur une piste en bord de rivière. D’abord au milieu du passage nous empêchant toute progression, ils finissent par se placer de part et d’autre, nous menaçant à chaque tentative d’avancée. Il faudra de longues minutes de patience et un grand coup d’accélérateur pour s’en sortir, le tout ponctué par un sonore barrissement. Et pour nous qui sommes dans le second véhicule un grand nuage noir ! Plus loin encore nous retrouvons un autre groupe affairé autour d’un acacia : ils offrent un joli spectacle en s’étirant au maximum pour que leur trompe monte le plus haut possible. Pour clôturer la visite, nous finissons, évidemment, par des femelles guibs harnachées, que nous ne pourrons toujours pas photographier par manque de lumière. Avant la grille, nous faisons une ultime halte sur le pont, le temps de profiter du soleil rougeoyant, déclinant derrière les arbres ; le temps aussi de constater, attristés, le spectacle déplorable offert par ce groupe d’anglais affublés de casques coloniaux et la bière à la main sur ce même pont. Que rajouter de plus ?

Un ultime salut aux gardes que nous croisons depuis quatre jours et nous rejoignons le camp pour la dernière fois. Béa nous a préparé une de ses spécialités que nous avons baptisée la « potée africaine » : un mélange de chou, de pommes de terre, d’oignons et de saucisses mijoté au feu de bois de mopane. C’était très bon, du premier au troisième service, à chaque fois avec une nouvelle saveur, terminant sur des notes caramélisées. Il est temps de nous confier aux bras de Morphée, qu’elle peuple notre nuit de plein de belles images de ce parc aux allures de paradis.
 
Vendredi 22 juillet, South Luangwa National Park, Lukonde Camp

Dernier réveil au camp de Lukonde, mais ce matin, nous avons le temps : pas de départ aux aurores. Nous prenons le temps d’admirer le lever de soleil sur la Luangwa. Une fois le campement plié, rangé et nettoyé, nous nous mettons en route. Pas très loin à vrai dire puisque nous faisons halte au petit marché de Mfuwe à deux kilomètre à peine du camp. Il est encore endormi mais il y a déjà de la musique et ce qu’il nous faut pour le ravitaillement, tout particulièrement un excellent pain et de succulents beignets. Pour les amateurs, on y trouve aussi des montagnes de petits poissons séchés (genre friture) mais sur le p’tit dèj : sans façon !

Cette fois, nous sommes vraiment partis. A la sortie de Mfuwe, une piste sans la moindre indication part sur la gauche en direction du nord-est, parallèle à la rivière. Ce sera notre fil rouge pour les deux journées à venir. Nous commençons par traverser diverses cultures, dont des champs de coton, et surtout de nombreux villages. Les saluts sont quasi systématiques. Plusieurs fois, nous traversons des rivières asséchées, devenues cordons de sable, pièges à 4*4. Cette piste se révèle agréable par la variété des paysages et de la végétation qu’elle offre : il fait bon dans les forêts de mopanes. A certains endroits, les arbres ont pris leurs quartiers d’automne et toutes les feuilles sont rousses, alors que plus loin certaines essences sont bien vertes. Dans une même région, cela donne un contraste surprenant.

Finalement, nous retrouvons le parc de la South Luangwa. Une extension dite secteur de Nsefu, y a été rattachée de ce côté de la rivière car elle abrite une zone saline indispensable aux animaux pour les apports en sels minéraux. Cette fois-ci, la « gate » est plus typique : une vraie barrière, certes antique, ferme le passage entre les huttes abritant les rangers et leurs familles. D’abord constitué de forêts diverses, cette partie du parc s’anime lorsque nous parvenons aux espaces dégagés. C’est le cas le long de la rivière Chichele, un affluent de la Luangwa. Nous apercevons d’abord un important groupe de pukus mâles non loin de la piste. Mais en y prêtant attention, nous distinguons au loin, en direction de la Luangwa, une masse. Les jumelles nous en révèlent l’origine. Il s’agit d’un énorme rassemblement de grues royales. Nous approchons un peu sans les effrayer, pour pouvoir les détailler. C’est une sorte de parade d’une centaine de ces belles dames. Nous poursuivons en remontant, en pleine chaleur, vers la source de la Chichele. J’ai la fabuleuse chance d’apercevoir ce qui me semble être la queue et la patte postérieure d’un lion. En nous approchant prudemment et sans trop de bruit, nous découvrons qu’il y a non pas une mais deux lionnes tapies à l’ombre d’un bosquet. Effrayées quelque peu, elles bougent mais la plus âgée des deux restent à portée de nos objectifs. Un vrai régal pour lequel tout le monde me remercie. Pourtant je n’ai fait qu’ouvrir mes yeux ! Nous finissons tout de même par atteindre la fameuse source : il s’agit d’une source d’eau chaude et saline. On pourrait littéralement préparer un thé tellement elle est chaude. Néanmoins, certains oiseaux semblent apprécier, vu leur proximité du jaillissement.

Quelques centaines de mètres après la source, alors que nous rentrons dans une zone boisée, nous apercevons une chose assez banale : des impalas ! Sauf que cette fois, ils vont nous offrir un excellent spectacle. Ils arrivent par dizaines, à pleine vitesse de la gauche de la piste et font un bond pour la franchir. Pas un n’y risque le bout d’un sabot. C’est à celui qui fera le saut le plus long. Nous les regardons faire ; et puis si nous avancions, nous risquerions d’en retrouver un dans le véhicule.

A la sortie du parc, nous profitons de la mi-journée pour avaler un casse-croûte à l’ombre, au bord d’un nouveau lit de rivière asséchée. Et la piste reprend vers le nord-est. Après quelques heures plutôt soporifiques, nous atteignons, au milieu de l’après-midi, le parc national de Luambe, un petit parc de 274 km² qui n’est protégé et conservé que depuis peu. Nul doute que dans quelques années, la faune sera très riche. Ici nous ne risquons pas de rencontrer grand monde ; le touriste est rare. Après de longues palabres, bien africaines, les gardes finissent par nous laisser entrer. Le couvert végétal est plus dense et plus sauvage. Aucune autre piste n’est encore aménagée ici. Une nouvelle fois, nous manquons d’être chargés par une femelle éléphant : serions nous fâchés avec cette espèce ? C’est à croire en tout cas. En nous arrêtant au bord d’un cours d’eau, nous observons un phénomène assez étrange. Un arbre pousse quasiment hors sol : un racine a poussé verticalement servant de pivot tandis que les autres racines partent à l’horizontale vers la berge. Et tout cela pousse et verdit !

Finalement, nous tombons sur l’un des clous de la journée. Au détour d’une mare, nous tombons sur la carcasse d’un hippopotame. C’est véritablement la curée : des dizaines de vautours sont là (à dos blanc, oricous) ainsi que des marabouts. Tout cela semble très organisé : une partie est massé autour du cadavre, un groupe patiente sur la butte de terre juste au dessus, et dans les arbres alentours, nombreuses sont les branches occupées. Et ne parlons pas du ciel où ça tournicote ! La liste d’attente est longue ! C’est aussi cela la nature et ces charognards sont indispensables pour nettoyer la brousse. Le spectacle est assez impressionnant : les têtes disparaissent dans les entrailles comme aspirées. Nous assistons aussi à des combats assez tendus, dans le but d’avoir une place de choix. Nous nous étonnons qu’ils ne se blessent pas avec leurs becs crochus et leurs serres. Nous sommes aussi surpris de les voir prendre un bain avant de récupérer un peu et pouvoir redécoller. C’est que ça leste de s’empiffrer ! Nous restons là un long moment, surtout qu’il n’y a même pas d’odeur désagréable, à part pendant quelques secondes lors d’une rafale de vent ! Mais tous les spectacles ont une fin et il faut rejoindre notre bivouac.

Ce soir, nous avons droit à un bivouac sauvage intégral : nous sommes encore à l’intérieur du parc, en pleine nature sans le moindre aménagement. Béa nous a réservé une très belle surprise. Nous camperons au bord de la Luangwa (pour changer !!) sous un énorme baobab presque millénaire si on juge à son diamètre. L’endroit est situé en surplomb du lit de la rivière à quelques mètres de hauteur. Celui-ci est d’ailleurs toujours aussi large avec une étendue d’eau toujours aussi réduite. Comment rêver meilleur cadre que ce camping aux milles étoiles ? Nous installons tous nos tentes le long de la berge, sous les branches bienveillantes du baobab, face au soleil qui se couche sur l’autre rive. Puis, à la nuit tombée, ce sont des milliers d’étoiles qui s’allument. Elles sont si nombreuses que, rapidement, nous avons du mal à distinguer les constellations dont la Croix du Sud et le Scorpion. Apparaît ensuite la Voie Lactée, immensément longue et si blanche, ici où aucune pollution lumineuse ne gêne ! Un vrai bonheur tout juste gâché par la gérante de l’unique lodge du parc qui cherche à nous faire déguerpir pour que nous venions dans son établissement. Elle en sera pour ses frais puisque nous avons reçu l’autorisation signée par les rangers de camper où bon nous semble. Encore une magnifique journée et une belle nuit sous le ciel zambien, nuit qui commence par les rugissements des lions et le cri des hyènes au loin, de l’autre côté de la rivière. Mais pas de visite nocturne. Gare tout de même aux sorties durant la nuit.
 
Samedi 23 juillet, Luambe National Park

Réveil dans ce petit coin de paradis. Ce sont les adieux à la rivière Luangwa que nous ne reverrons plus. Devant nous, alors que le soleil émerge, une dizaine de cigognes à bec jaune se réveillent très lentement. Les mouvements sont comptés, et une à la fois ! Même les hippopotames, moins nombreux qu’à l’habitude, sont parfaitement paisibles ! Une raison de plus, si c’était nécessaire, de laisser l’endroit totalement vierge sans la moindre trace de notre passage. Même les cendres de notre feu sont enterrées. C’est à ce prix là que les gens pourront continuer à camper dans de tels endroits. Juste derrière le campement, en quittant les lieux, Béa aperçoit des traces fraîches de lions. Nous n’étions donc pas si seuls cette nuit ! Mais aucun risque à condition de respecter quelques règles de base. Cette constatation faite, nous reprenons la piste pour cette journée qu’on pourrait qualifier de liaison.

Après la sortie du parc, la piste est plus ou moins bien entretenue mais presque tout le temps dans des forêts quand nous ne traversons pas les nombreux petits villages. Nous sommes d’ailleurs impressionnés par leur propreté : elles sont nombreuses à « balayer » devant leur palier dans les premières heures du matin. Rien ne traîne, chaque objet est rangé à sa place. Certaines huttes sont même peintes avec des frises colorées. Tout au long du trajet, ce sont que sourires et bien sûr les incontournables bicyclettes, chargées au maximum, à tel point que nous nous demandons comment tout cela tient et comment ils réussissent à s’arrêter. Nous faisons une halte ou deux près de ces villages, histoire de nous rendre compte de la vie dans ces coins reculés de l’est zambien.

Plus on avance, plus le paysage change. Les mopanes laissent place aux miombos tandis que la route s’élève. Petit à petit nous prenons de l’altitude. Par contre, une fois encore nous traversons ces nombreux brûlis allumer traditionnellement pour débroussailler et faire repartir la végétation. Il est surprenant de voir que cela ne dégénère jamais en immense incendie. Par contre, cela laisse des zones noircies par forcément accueillantes ! Cette pratique semble même avoir cours dans les parcs nationaux comme nous avons pu le constater dans le secteur de Nsefu. Nous finissons par atteindre la dernière grande ville zambienne, Lundazi. Nous ne faisons que la traverser, mais cela nous laisse le temps de constater que c’est la première fois que nous voyons autant de monde depuis le départ. Mais toujours pas un blanc de la journée. Ils ne fréquentent pas ce coin méconnu et reculé de Zambie.

Une petite demi heure plus tard, nous atteignons la frontière ou plutôt ce qui fait office de ! A l’intérieur du poste, pas âme qui vive, ni même le moindre cahier de passage. Inno doit s’y reprendre à deux fois avant d’apprendre que les douaniers finissent leur café ! Pendant ce temps là, un vélo rentre en fraude en contournant le poste ! Attention à ne pas s’appuyer au comptoir sinon vous ferez le ménage dessus. Les passages sont rares ici, alors ne parlons pas des passages d’occidentaux. Si il y en a un par mois, c’est bien ! Finalement, nous obtenons notre tampon, mais, chose unique, la douanière a même noté notre adresse exacte en France sur son cahier !!! L’adresse « France » ne suffisait pas, comme partout ailleurs ! Excès de zèle ? Quelques mètres plus loin, c’est le poste douanier du Malawi que nous rejoignons à pied. En apparence, il est occupé ; on entend même de la musique. Erreur, la personne chargée de l’immigration prend son repas et son collègue ne semble pas décidé à le remplacer, s’occupant uniquement des quelques routiers. Il faut donc patienter ! Ils sont cools ici ! Bilan, il nous faudra une bonne heure pour franchir la frontière et passer de Zambie au Malawi.

La piste toujours la piste, direction le nord-est. Ce soir encore, il est prévu un bivouac sauvage au programme. Mais il y fera plus frais : nous sommes passé de 700 à 1600 mètres d’altitude et le vent souffle sur ce plateau du nord-ouest du Malawi. En revanche le cadre est agréable : dans la verdure non loin d’un « hameau », entouré par de nombreux bosquets, au pied d’une colline. Le montage se fait sous les yeux amusés et surpris des habitants voisins : mais quel est ce village de toile, mobile ? Il est alors temps d’effectuer la dernière activité « physique » de la journée. Déjà dans la journée, après quelques pauses, nous étions repartis à pied, récupérés au passage par les deux véhicules. Donc, pour terminer, nous gravissons ce petit escarpement, azimut sanglier puisque aucun chemin n’est tracé. Il nous faut une petite demi heure pour atteindre le sommet et profiter de la vue à 360° sur la région. Vers l’ouest, le paysage est assez plat parsemé par de nombreux villages. Vers l’est, le relief s’élève : nous sommes sur les contreforts du plissement de la Rift Valley mais toujours pas de lac à l’horizon.

Une fois n’est pas coutume, ce soir tout le monde est chaudement couvert. Je ne parle pas de Béa qui est équipée comme pour les sports d’hiver ! Nous apprécions d’autant plus la soupe chaude, et le cercle autour du feu est plus resserré que d’habitude ! Côté gastronomie, Inno nous a préparé une de ses spécialités : de la salsa (fariné de maïs) préparée façon polenta avec une sauce aux légumes et saucisses. Avec les rations servies, nous ne risquons pas de nous envoler. Les tentes seront bien lestées ce soir. Avec le vent qui souffle cette nuit, il fait bon emmitouflé dans le sac de couchage. Les sorties nocturnes incontournables sont « difficiles ».
 
Dimanche 24 juillet, à l’ouest du Malawi

Il fait toujours aussi frais ce matin au réveil. Le vent ne facilité pas le pliage des tentes. Alors que certains sont partis devant à pied, une petite fille accompagnée de sa mère vient nous offrir une assiette de cacahuètes (natures et bios celles-ci !) ; en échange, nous ne pouvons pas faire moins que lui donner quelques vivres. Après avoir laissé le terrain net, nous reprenons la piste pour quelques dizaines de minutes. Nous finissons par retrouver une vraie route bitumée avec les lignes et tout ce qu’il faut. Cela faisait un bon moment que nous n’en avions pas vu ! Nous continuons aussi à prendre de l’altitude, petit à petit, sans nous en rendre compte. Enfin si, car la végétation change : ce sont désormais des forêts d’épineux qui nous entourent, principalement des pins et des sapins. Avec le brouillard qui couvre le paysage, on pourrait presque se croire dans les Vosges ou le Jura ! Dans la montée, nous apercevons de nombreuses exploitations forestières. Les tas de planches sont entreposés directement sur le bord des routes et les forestiers campent juste à côté.

Nous montons ainsi jusqu’à plus de 2000 mètres avant de redescendre vers la grande ville du nord du pays, à savoir Mzuzu. C’est là que Béa a prévu le ravitaillement, tant en vivres qu’en carburant. Ainsi, elle nous laisse quartier libre pendant une heure, le temps pour nous de découvrir le marché. Manque de chance, il pleut averse sur la ville depuis quelques minutes. Cela devient donc une vraie pataugeoire pas forcément très propre. Ne cherchez pas d’artisanat ici, il n’y en a point. Le tourisme n’est pas vraiment développé dans cette partie du pays. Vous n’y trouverez que des biens de consommation courante. Les petits restaurants font quelque peu peur à voir (à réserver aux locaux !) ; que dire aussi des étals de poissons séchés esthétiquement présentés mais plutôt nauséabonds. Dans une petite cour, nous tombons sur le coin des tailleurs, uniquement des hommes affairés sur de vieilles machines à coudre Singer. On peut aussi voir de nombreuses sortes de haricots secs ainsi que des monticules de cacahuètes. Et miracle technique : des « cases » téléphoniques ; allez savoir comment c’est possible mais ils arrivent à faire fonctionner des téléphones au beau milieu du marché ! Nous passons finalement trois bons quarts d’heure, le temps de nous faire une idée (et pour certains d’acheter quelques tissus africains).

Après un encas à base de petites bananes et de beignets, nous reprenons la route en direction du lac Malawi avec la promesse qu’il y fera beau. Difficile à croire vu la météo sur Mzuzu. Petit à petit, pourtant, les gouttes s’espacent, au moment où nous traversons les plantations d’hévéa. On y produit encore du caoutchouc : cela ressemble aux forêts des Landes avec les troncs saignés et les petits pots en terre pour récolter la sève. Nous apercevons aussi de nombreux enfants qui vendent des balles fabriquées avec le caoutchouc qu’ils détournent des plantations.

Deux bonnes heures plus tard, nous apercevons enfin une étendue aquatique : le lac Malawi, plus grande étendue d’eau pure (les lacs Victoria et Tanganyika sont plus grands mais pollués !), s’offre enfin à nous du côté de Nkhata Bay. C’est là que nous pique niquerons : dans le « jardin » d’un malawien. Nous espérions atteindre la plage avec nos 4*4 mais devant l’étroitesse du chemin, un groupe d’enfants nous a indiqué cet endroit. Nous mangeons donc devant un nombreux public (néanmoins très calmes) aujourd’hui ; et ces gros avocats sont toujours aussi fondants et savoureux. Quel goût, natures !! Pendant la préparation du repas, nous en profitons pour aller sur la plage toute proche : du sable extrêmement fin et clair, une série de pirogues étranges car l’ouverture n’est pas assez large pour permettre à un pêcheur de s’y glisser, et du manioc qui sèche au soleil, enfin en passe de se montrer à travers les nuages.

Après ce bon repas, nous reprenons la route côtière plein sud direction Nkhotakota, à environ 150 kilomètres. La plupart du temps nous avons le lac en vue. Nous sommes surpris par les divers ponts qui ponctuent cette voie de circulation : ils ne sont que sur une seule voie, alors gare ! Enfin, nous parvenons au terme de notre étape quelques kilomètres après la sortie de la ville de Nkhotakota : une piste d’environ quatre kilomètres mène au Njobvu Safari Lodge tenu par un couple d’anglais (Njobvu signifie éléphant en Chichewa). En chemin, nous traversons divers villages ainsi qu’une noce qui a attiré beaucoup de monde. A cette distance de la route, nous n’entendons que le bruit des vagues sur le lac. Le cadre est parfait : les cases en dur sont disposées le long de la plage, sous un couvert végétal, toutes blanches, simplement ornées d’une frise colorée, et surmontées d’un toit de chaume. Les autres lieux de vie (bar et salle de restaurant) sont construits en bambou. Un vrai petit bonheur, parfaitement intégré au paysage.

Dès le sac posé, il me paraît incontournable de commencer par une petite baignade dans les eaux claires du lac. La température de l’eau est plutôt accueillante et incite à quelques brasses. Hormis l’absence de sel, on se croirait à la mer puisqu’on aperçoit même pas l’autre rive, en face, au Mozambique. Après ces ablutions, il est temps de profiter d’une bonne douche, tant attendue après deux jours de bivouac sauvage, et quatre de douche froide. Un vrai bonheur ce petit confort ! Frais, propre et désaltéré, je pars me promener le long de la plage pour découvrir la baie voisine et réaliser quelques clichés de pêcheurs. Ce ne semble pas avoir mordu cet après-midi, à peine une dizaine de petits poissons pour trois. Je rencontre de nombreuses personnes dont une ribambelle d’enfants qui ne sont pas trop collants, et n’insistent pas quand on leur dit non. C’est particulièrement appréciable. Pour celui qui aime marcher, la côte, à cet endroit là, est une succession de petites anses sablonneuses délimitées par un petit promontoire rocheux.

De retour au lodge, nous avalons un petit apéro avant de passer à table pour un repas aux accents anglais mais à base de poisson du lac. Ce soir nous veillons ! Le repas est servi à 19 heures et nous ne rejoignons nos cases qu’à 21 heures passées. D’habitude, à cette heure là, il y a longtemps que tout le monde est couché. Quoi qu’il en soit nous allons enfin dormir dans un vrai lit et sous une moustiquaire, bercés par le son des vagues.
 
Lundi 25 juillet, Nkhotakota, Njobvu Safari Lodge

Aujourd’hui ce sera journée sans voiture. Les 4*4 sont révisés. En ce qui nous concerne, nous avons journée libre. A commencer par le réveil : grasse matinée au programme, d’autant plus que le petit déjeuner n’est servi qu’à partir de 7h30. J’en ai même raté le lever de soleil sur les eaux du lac. Les patrons étant anglais, j’opte pour l’« english breakfast ». De quoi tenir toute la matinée !

Après cette copieuse mise en bouche, j’opte pour une ballade le long de la piste qui mène à la route. Je traverse ainsi les nombreux champs de manioc ainsi que plusieurs villages qui se réveillent. A chaque fois, les plus petits accourent, commencent par demander quelque chose et finissent par faire quelques pas dans ma foulée. On s’y habitue très vite, surtout que tous les gens croisés sont tous très souriants. Par contre les plus jeunes ne connaissent que quelques mots d’anglais ; et donc, vu ma maîtrise du chichewa, les dialogues sont plutôt limités ! Après une bonne heure, je fais demi-tour. En chemin, un jeune homme à bicyclette met pied à terre et m’accompagne quelques temps, me faisant un bout de causette. Il m’explique qu’il travaille à la poterie voisine de notre lodge. De retour, j’en profite pour faire le tour de la basse cour : en effet, les propriétaires ont choisi de produire un maximum de choses ; il y a donc des volailles, des cochons, … Je monte ensuite au sommet de la vigie, buller un peu. Ainsi, je peux tout à la fois lire, observer le lac à la jumelle ou prendre quelques clichés de temps en temps, comme par exemple ces deux vélos dans le sable ou encore cet autre qui trait sa vache au bord de l’eau avant de nourrir un des veaux avec le lait. Je passe le temps jusqu’à 11h30, heure du rendez-vous que nous a fixé Béa.

Elle nous emmènent manger au restaurant du lodge voisin. Nous sommes installés sur la pelouse avec vue sur le lac, devant une table en céramique figurant le lac et les activités quotidiennes africaines. Et toute la vaisselle est à l’avenant. En fait, à l’origine, le lodge était un simple atelier de poterie, qui s’est, depuis, pas mal diversifié. Après un excellent repas (pain frais maison et moussaka locale), nous faisons donc un tour dans ce fameux atelier. Cela nous occupe une bonne partie de l’après-midi : c’est qu’ils sont cools ici ! Alors on patiente : j’aperçois même le gars de ce matin. On peut y trouver divers objets ainsi que des figurines, et même des carrelages typiquement africains. A l’arrière de la boutique, nous apercevons les employés entrain de décorer, sculpter ou même enfourner. C’est aussi le premier endroit où nous trouvons des cartes postales, malheureusement, le stock est bien moindre que ce qui est sur le présentoir.

De retour au lodge, je pars piquer une tête dans le lac avant de me lancer dans l’écriture de mes cartes postales. Voilà une activité qui occupe bien ! Un petit tour vers la baie voisine pour voir rentrer les pirogues des pêcheurs avant de revenir au bar pour l’apéro quotidien. Nous essayons de discuter avec le patron, en anglais. Et ce soir, Inno tient sa promesse de nous apprendre à jouer au bao (il s’agit de ce jeu traditionnel africain avec des pierres à déplacer dans les encoches d’un plateau : le nom diffère selon le pays mais le principe reste le même). Il commence par nous apprendre les règles zimbabwéennes (son pays) puis celles du Malawi. Nous sommes battus à plate couture la première fois mais égalisons dans la seconde. Nous passons ainsi un bon moment entrecoupé de fous rires dus à notre méconnaissance des règles. Demain, fini la récréation au bord de l’eau : nous reprenons la route du sud.
 
Mardi 26 juillet, Nkhotakota, Njobvu Safari Lodge

Dernier réveil au bord du lac. Le soleil levant ne sera pas parfait, la faute à quelques nuages. Un bon petit déjeuner dans le ventre et nous prenons la route plein sud. Quelques kilomètres après le lodge, nous nous arrêtons sur le pont qui sépare le lac du lagon Chia. A la base, nous espérions apercevoir des pêcheurs à l’épervier, manque de bol, ils utilisent un filet classique tendu en travers du chenal. Mais la chance est avec nous ce matin. Béa pousse soudain un cri en pointant la lagune : des loutres, des loutres ! C’est alors l’attroupement tant des touristes que des autochtones. Tout le monde observe ces trois loutres du Cap qui batifolent joyeusement. Une quatrième est visible au loin : elle semble pêcher. Après avoir bien joué, les trois premières choisissent de passer quelques minutes au soleil sur un rocher. Elles finiront par disparaître dans les roseaux. Quant à nous, nous ne cessons de courir du pont au véhicule : une fois pour l’appareil photo, puis pour les jumelles ! Une bonne petite mise en jambe. Nous reprenons ensuite la route ponctuée de nombreux barrages de police (comme partout au Malawi) : cela peut n’être rien qu’un simple bonjour comme cela peut être compliqué (un d’entre eux exigera de voir nos deux triangles de sécurité alors que nous n’en avons qu’un seul !). Pour résumer, il faut être patient et un rien baratineur ! Et cette exigence des triangles est plutôt comique quand on voit que la plupart des véhicules en panne sur les routes n’indiquent le danger qu’avec deux branches d’arbres, une devant, une derrière !!

Bon gré, mal gré, nous arrivons à Salima où nous faisons une petite pause. L’endroit est très animé par diverses échoppes directement sur la route : on y fabrique des récipients en fer blanc, on revend de la chambre à air débitée en fines bandelettes, on y propose aussi de la viande à l’étal d’un pseudo boucher (la carcasse est pendue à l’air libre, dans la rue !!). Peu avant Bakala, nous faisons la pause déjeuner près d’anciens séchoirs à tabac construits en brique mais désormais en ruines depuis que le Zimbabwe de Mugabe n’achète plus de tabac. Comme cela est déjà arrivé, un petit groupe d’enfants, des garçons, nous regarde pendant le repas, mais très sagement, sans même quémander. Ils doivent être surpris de voir les hommes travailler (la vaisselle était faite par Inno) alors que chez eux, ce sont surtout les femmes qui travaillent. Cette petite assemblée s’excite en revanche dès que nous partons.

Après avoir franchi, avec quelques difficultés, le dernier barrage, celui de Liwonde, nous franchissons la rivière Shire qui fait s’écouler le lac Malawi vers le Zambèze. Nous voici aux portes du parc national de Liwonde, le principal parc naturel du Malawi. Après avoir franchi l’entrée sud, trente kilomètres de piste nous attendent avant de rejoindre le lieu de notre campement. La végétation, très sèche, surprend après la verdoyance de la Luangwa : nous découvrons de nombreux figuiers étrangleurs, des baobabs de toutes tailles, des euphorbes arborescentes (ressemblant un peu à des grands cactus), des acacias jaunes et même des ébènes blancs. Nous apercevons néanmoins quelques antilopes (les classiques impalas, cobes et koudous). Peu à peu apparaissent palmiers, hautes herbes et verdure : nous approchons de la rivière. Cela semble être un paradis pour les ruminants. Nous longeons un instant la clôture de l’enclos des rhinocéros : depuis quelques années a été lancé un programme de réintroduction ; actuellement, ils en sont à la phase d’acclimatation des rhinocéros avec le reste de la faune avec l’espoir de supprimer dans quelques temps la séparation et laisser les rhinocéros parcourir l’intégralité du parc. Nous arrivons vers 14h30 au camp de Mwuu (qui signifie hippopotame en chichewa) qui propose à la fois un lodge en chalets et un terrain de camping sur les rives de la Shire. Encore un endroit sympa pour camper bien que très aménagé et fréquenté par rapport aux bivouacs que nous avons déjà connu.

Après un montage de tente de plus en plus rapide, nous explorons le lieu rencontrant, entre autres, un phacochère  énorme en train de brouter la pelouse entre les chalets. Finalement, vers 16h30, nous repartons faire un petit tour dans le parc, histoire de nous imprégner de l’endroit. Dès la sortie du camp, nous nous rendons compte que les animaux ne sont pas farouches ici. Les impalas sont très proches des véhicules. Au bord de la rivière, nous observons principalement des oiseaux. D’abord un palmiste africain ou aigle des palmiers qui vient se désaltérer pendant que sa moitié niche dans un des palmiers tout proche. Contrairement à ce qu’on pourrait croire en l’observant, il ne s’agit pas là d’un aigle mais d’un vautour. Plus loin, c’est un couple de bécassines peintes qui nous retient : Madame est bien plus élégante que Monsieur avec sa livrée grisée. Et puis c’est au tour d’un martin pêcheur de réussir à prendre un poisson. Le cérémonial qui suit est assez comique. Saisi par la queue, le poisson est assommé une bonne trentaine de fois sur la branche qui sert de perchoir. Quelle énergie ! Ce n’est qu’après de longues minutes qu’il se décide enfin à l’avaler. Pour cela, il faut qu’il l’attrape dans le sens de la longueur. Ce n’est pas le moment de le tomber ! Mais il s’agit d’un gros morceau : tout finit tout de même par rentrer ! Pendant ce temps, derrière nous, un hippopotame solitaire broute de l’herbe pourtant déjà bien rase.

Non loin de l’entrée du camp, c’est un groupe d’éléphants qui mange dans la pénombre naissante. C’est probablement eux que nous entendrons barrir plus tard dans la soirée. Enfin, notre tour s’achève sur un guib harnaché bien placide, couché à découvert, non loin de sa femelle. Mais une fois encore, impossible de les immortaliser, la lumière manque. Parviendrai-je à les prendre en photo ?

Pendant notre repas, nous observons un employé du camp déposer une lampe à pétrole devant chaque tente. Ainsi vous voyez ce qui se passe si vous sortez de votre toile en pleine nuit. Le lieu est particulièrement sombre, et sans cela, nous ne verrions ni hippos ni éléphants qui pourraient traîner là ! A part ça, nous passons une bien agréable nuit ponctuée de barrissements, de cris d’hippos et de craquements non identifiés.
 
Mercredi 27 juillet, Liwonde National Park, camp de M’Vuu

Nous reprenons nos bonnes habitudes de brousse après une pause « modernité ». C’est donc sur les coups de 6h que nous avalons notre café avant de partir dans le parc. Nous nous dirigeons vers le nord en essayant de suivre au maximum la rivière. Nous faisons une halte assez rapidement près des cormorans aperçus la veille depuis la terrasse du lodge. Ils sont des centaines à nicher là au sommet des palmiers. Et cela piaille déjà gaiement malgré l’heure matinale. Cela virevolte aussi dans tous les sens, principalement pour changer de branche. En effet, nous constatons qu’ils sont particulièrement patauds. Les atterrissages sur les palmes sont plus qu’aléatoire et se concluent assez régulièrement par une nouvelle boucle autour de l’arbre ! Quant aux décollages, ils commencent par une chute libre. Certains essayent même de construire leurs nids mais les morceaux de feuille ne finissent pas tous là où il faut. Finalement, de simples cormorans nous offrent un bon moment d’observation. Sur la fin, nous avons même l’occasion de voir un de leurs prédateurs, le gymnogène, un rapace gris, les chasser de leurs nids. Il suffit qu’il approche pour que tous les nids soient évacués. Mais il ne touchera pas aux œufs. En revanche, il fait preuve d’une agilité incroyable en s’agrippant au vol sur un tronc. Petit à petit, des vols de cormorans s’envolent au dessus de la Shire vers le lac Malombe au nord : c’est vraiment un spectacle gracieux.

Un peu plus loin, sur les berges herbeuses, nous retrouvons les incontournables impalas ainsi qu’un certain nombre de cobes à croissant. Au hasard d’un sous-bois, nous devinons un couple de touracos à huppe splendide ou touracos pourpres sous un taillis. Contrairement son homologue gris, il est particulièrement gracieux : de couleur verte, il présente une belle crête, bleue de même que le dessus des ailes. Et lorsqu’il prend son envol, il révèle une magnifique couleur rouge sous ses ailes. Splendide, mais dommage qu’ils soient restés cachés sous les branches ou alors en plein contre-jour. Caprice de star ? Un peu plus loin, nous trouvons de gros crocodiles laissant juste apparaître le dessus de leur tête au dessus de l’eau. Souvent cela laisse présager de la taille de la bête. Il y en a même un qui nous fait le plaisir de sortir et de s’étaler sur la berge.

Nous reprenons ensuite la direction du nord pour atteindre la limite du parc. Sans s’en rendre compte, nous nous retrouvons à l’extérieur, vu qu’il n’y a pas de clôtures. Nous finissons par atteindre les rives du lac Malombe qui sert, en quelque sorte, de déversoir au grand voisin, le lac Malawi. L’endroit est marqué d’un énorme baobab qui est étreint par un figuier étrangleur tout aussi gros, voir plus. D’ailleurs, c’est à lui qu’appartiennent toutes ces feuilles. Juste en dessous se sont regroupés une vingtaine de villageois. En fait, ils attendent l’heure de départ de la barque qui leur permet de franchir la rivière Shire pour rejoindre les autres villages en un minimum de temps.  Nous patientons quelques minutes pour assister à l’embarquement.  Le capitaine, seul membre d’équipage, fait d’abord charger un nombre impressionnant de vélos à l’avant de sa large barque métallique, comme enfilés sur la proue. Un demi-tour plus loin, il laisse embarquer ses passagers. Ceux-ci doivent se mouiller pour monter tant bien que mal à bord. Quelques-uns restent à l’eau pour pousser. Puis six rames sont distribuées à des volontaires à qui il faut un certain temps pour être en rythme et ramer droit. Apparemment ses volontaires sont exemptés de droit de passage : leur sueur sert de paiement !

Le spectacle est terminé ; quelques photos du baobab et nous retournons dans les limites du parc. Béa essaie au maximum de nous ramener sur les prairies bordant la rivière : les animaux semblent adorer ces coins-là. C’est en se dirigeant vers l’une d’elles que nous finissons par apercevoir quelques éléphants dans la forêt de mopanes, semblant se diriger vers l’eau. Nous n’hésitons pas bien longtemps à rejoindre les bords du cours d’eau. C’est alors un fabuleux spectacle qui s’offre à nous. Un défilé ininterrompu de pachydermes nous passe devant le nez, avec de très nombreux jeunes, dont certains très petits âgés d’au plus un mois. Fred en comptera une quarantaine : en ce qui nous concerne, l’œil collé au viseur, nous sommes bien incapables de les dénombrer ! Leur première destination est un bosquet d’acacias qui semble les ravir. La majorité du groupe converge là tandis que la dernière dizaine se sépare pour aller plus loin. Nous sommes d’ailleurs cernés pendant un instant. Finalement, la matriarche donne le signal et tout ce petit monde part se désaltérer mais point de baignade même pour les plus petits ! Personne ne déroge à la règle. Puis retour vers un second acacia. C’est alors que nous assistons à une superbe scène. Les mères se sentent menacées par notre 4*4. Tout d’un coup, c’est un bloc compact d’éléphants qui nous fait face : les jeunes au cœur et trois grosses femelles en première ligne, toutes oreilles déployées. Il est plus prudent de reculer un peu pour continuer à profiter du spectacle. Il était tellement prenant que nous n’avons pas vu les deux jeunes mâles derrière nous qui cherchent à s’impressionner mutuellement sans même nous prêter attention. Après plus d’une heure de « représentation » sur fond de palmiers et de rivière, nous décidons de les laisser tranquilles et de retourner au camp.

En chemin, nous tombons sur trois grands calaos terrestres. Dans leur déambulation, ils finissent par approcher le nid d’un pluvier à caroncule, un petit oiseau blanc et noir avec un bec et des pattes jaunes. C’est le branle-bas de combat. Se relayant, les deux pluviers (beaucoup plus petits que les calaos) attaquent en piqué les assaillants tout en poussant des cris. C’est très amusant de les voir faire ! Un peu moins pour les calaos qui finissent par s’écarter. C’était un peu David contre Goliath ! Après ce dernier intermède, nous rejoignons vraiment Béa qui a dû se battre toute la matinée avec les babouins et les vervets pour défendre le campement. Nous serons de la partie tout au long du repas. De véritables chapardeurs ceux-là ! Entre midi et deux, nous explorons les abords du lodge à la recherche de petites bêtes. Nous tombons à deux reprises sur de beaux varans mais rien de plus. Quoi que le second est en position assez acrobatique, enfoncé qu’il est dans un trou juste retenu par une de ses pattes arrières, restée à l’extérieur. Bien évidemment, il y avait les oiseaux qui nous approchent tels le guêpier de Böhm, adorable avec sa face orange, son œil noir et son corps vert, ou le petit cordon bleu !

L’après-midi sera beaucoup plus calme mais tout autant réussi. Nous commençons par retrouver nos éléphants du matin dans le sous-bois. Puis nous continuons plus loin sans voir beaucoup de choses nouvelles : toujours des impalas et des cobes à croissant, et surtout énormément de phacochères de toutes tailles, amusant avec leur queue dressée telle une antenne. Après plusieurs circonvolutions, nous retournons à la « prairie à éléphants » espérant les y retrouver pour le coucher de soleil. Malheureusement, ils partent dans le chemin inverse. Nous profitons donc du paysage offert par ce cadre idyllique, quand soudain Béa aperçoit deux éléphants au loin. Ni une, ni deux, nous embarquons direction cette autre prairie. Nous arrivons juste à temps pour immortaliser un de ces deux éléphants dans le soleil couchant. Désormais, nous pouvons rentrer satisfaits au camp.

La soirée se terminera autour d’un délicieux verre d’Amarula offert par Pierre au bar du lodge. Et en gage de sécurité ultime, nous sommes raccompagnés du bar jusqu’à nos tentes, par deux employés « éclairés », au cas où on croiserait un hippopotame dans la nuit noire.
 
Jeudi 28 juillet, Liwonde National Park, camp de M’Vuu

Dernier réveil dans la nature ce matin. Nous continuons notre quotidien, à savoir réveil à 6h (voir même plus tôt pour la plupart d’entre nous) avant d’avaler un p’tit déjeuner classique. Avant de partir, Fred nous propose un dernier petit tour dans le parc. Nous retrouvons la famille éléphant juste à la sortie du camp. Mais nous commençons par retourner voir le coin des cormorans. Ils sont toujours là, aussi nombreux, mais dans la majorité toujours aussi patauds ! Dans la petite lagune, le crabier chevelu, un oiseau ébouriffé en forme de boule de couleur beige, est lui aussi fidèle au poste. Nous ne nous lassons pas de ce spectacle ainsi que les départs en formation au dessus de la rivière, direction le lac Malombe.

Nous poursuivons en reprenant les mêmes pistes que la veille : cela reste les meilleurs endroits pour observer la faune. En chemin, plusieurs guibs harnachés nous échappent, évidemment. C’est décidément une espèce très farouche, tout le contraire des impalas et des cobes à croissant qui sont toujours là en nombre. En revanche, l’avifaune n’est pas encore très réveillée et reste clairsemée. Par hasard, nous nous engageons sur une de ces prairies au bon moment : nous apercevons un groupe d’une dizaine d’hippotragues noirs, ces grandes antilopes très chevalines, quasiment toutes noires, avec de grandes cornes recourbées vers l’arrière. Quel spectacle splendide dans la lumière du matin ! C’était une première pour moi. Ce moment est bref car elles sont très craintives. Nous les retrouvons dans les sous-bois partiellement cachées mais tant pis, nous restons là à les admirer. Comme quoi il faut savoir rester patient jusqu’au bout. Sur la piste du retour, nous trouvons même des babouins coopératifs qui se laissent volontiers photographier.

Vers 8h30, nous sommes de retour au campement pour plier les tentes avant de quitter ce petit coin de paradis. La piste qui nous mène à la sortie du parc est plus spécialement consacrée aux photos de botanique : les figuiers étrangleurs sont particulièrement nombreux dans cette partie. Une fois dehors nous retrouvons la route qui doit nous conduire du côté de Salima.

Pour être précis, nous nous installerons à Senga Bay au bord du lac Malawi, que nous retrouvons. Une nouvelle fois nous traversons un très grand nombre de villages et presque autant d’églises différentes, en plus des mosquées et des madrasas ! Mais comment autant de sectes et courants religieux arrivent à avoir des fidèles ? Les petits étals en bordure de route sont toujours aussi nombreux, proposant de tout, depuis le sac de charbon au tapis en passant par les fagots de chaume. On aperçoit aussi de nombreux lieux de fabrication de briques. Il faut dire que dans cette région, on commence par fabriquer les briques avant de construire une case. Après avoir été moulées et séchées au soleil, les briques sont empilées de façon à former un four à l’intérieur duquel on allume le feu. Après la cuisson, les briques peuvent devenir mur.

Après avoir passé le « centre ville » de Salima, nous faisons une halte au marché artisanal. Il s’agit en fait d’une rangée de paillotes sommaires alignées au bord de la route qui mène à Senga Bay. On y trouve des tas d’objets en bois, qui vont de la sculpture humaine ou animale aux tables basses, en passant par toute une série de récipients divers et variés. Ils font même d’adorables petits 4*4 très réalistes fabriqués à partir de feuilles de palme, mais malheureusement trop encombrants. Par contre, les prix sont peu élevés et se négocient très facilement.

Arrivés à Senga Bay, nous nous installons au Steps Camp, juste derrière l’hôtel Méridien. Ce soir, nous camperons directement sur la plage face au lac, dans une petite anse bordée de rochers. La tente est vite montée pour aller piquer une tête. Du fait d’un vent assez soutenu, il y a même des vagues importantes : un vrai régal, et sans le sel !! En revanche, le dernier repas en commun sera plus compliqué, tout volant assez facilement : verres, assiettes, et même le poivre dans les yeux du voisin ! Du coup, les polaires sont bien appréciables ! Nous essayons de profiter au maximum de ces derniers moments ensembles. Et le vent continue : les tentes se tordent en tout sens. Pourvu qu’elles résistent encore une nuit !


Vendredi 29 juillet, Senga Bay, Steps Camp

Dernier jour avec le groupe. Le cadre du camp était sympa, sur le sable ; malheureusement, les éléments semblaient être contre nous cette nuit. Le vent, heureusement pas trop frais, n’a pas cessé de souffler, certaines rafales donnant l’impression d’emporter la tente. D’ailleurs, celle de Pierre a en partie cédé. Nous n’entendions même plus le bruit des vagues mais un grondement continu : rares sont ceux qui ont bien dormi cette nuit. D’autant plus qu’ils ont dû cogiter à propos de la grève chez South African Airways qui pourrait les retenir plus longtemps que prévu. Finalement, en partant un jour plus tard sur une autre compagnie, je vais peut être arriver avant eux ! Ca serait un comble.

Etant donné que Bea, et Inno repartent au Zimbabwe, je suis transféré du camping au Safari Beach Lodge situé tout près, de l’autre côté de la colline, au coeur d’une autre anse. Quand on y arrive, on aperçoit juste cette demeure blanche, ancienne maison forestière. Mais pas de trace de chambre ! Le mystère s’épaissit lorsque vous entendez « tente 7 ». En fait, ils ont installé de grandes tentes sur des pontons à flanc de rocher, avec tout le confort : lits, douche sur la terrasse, vue imprenable sur le lac. Simple et original ! Après cette découverte des lieux, il est temps de dire au revoir à tout le monde. Je reste seul sur place jusqu’à demain ; eux filent à l’aéroport avant que l’équipe ne reparte à Harare au Zimbabwe via le Mozambique !

Ma première activité de la matinée va être de ne rien faire. Je m’étends sur le lit dans l’espoir de récupérer  un peu du sommeil perdu, sans trop d’efficacité à vrai dire. Par la suite, je me promène dans le lodge guettant la faune locale : damans des rochers (une sorte de marmotte apparentée à l’éléphant !), martins-pêcheurs pies, lézards colorés, … Présents mais pas trop et surtout pas fan des paparazzi ! Il y a aussi quelques belles images à faire avec les embarcations des pêcheurs voisins. Une matinée qui s’écoule tranquillement. L’après-midi suivra dans le même esprit mais avec la baignade en plus ! Une dernière fois dans ce lac Malawi. Mais dur de s’immerger, il doit y avoir trente centimètres d’eau sur des dizaines et des dizaines de mètres. Il faut vraiment aller au large pour ne plus avoir pied. Heureusement, le vent est bien tombé ce qui m’offre une après-midi des plus agréables avec juste quelques vaguelettes. Après un coucher de soleil décevant (il se cache derrière une chaîne de montagnes au loin, pas un reflet dans l’eau), la corvée d’avant départ se présente : refaire le sac en se débarrassant du superflu de manière à passer l’enregistrement des bagages sans encombres. Pour mon dernier repas au Malawi, j’opte pour du filet de poisson du lac, certainement pêché du jour, appelé chambo, servi avec du riz et un mélange de crudités. Voilà qui permet de finir sur une bonne note, à la lumière d’une chandelle, sur la terrasse du lodge sous un ciel magnifiquement étoilé, et bercé par le doux bruit des vagues.

Demain une longue journée commence, rarement la plus sympa du voyage.
 
Samedi 30 juillet, Senga Bay, Safari Beach Lodge

Voilà, le jour du retour est arrivé. Le réveil se fait tranquillement. De toute façon, le petit déjeuner n’est servi qu’à partir de 7h15, alors rien ne sert de se presser. De toute façon, eux aussi sont cools. Le service se fait tranquillement, et il me faut bien une quarantaine de minutes avant d’en avoir terminé. 8h approche. Il est temps de se mettre en route. Les sacs sont bouclés et chargés dans le 4*4 du lodge. Je vais être accompagné jusqu’à l’aéroport de Lilongwe par un des employés. Il faut bien compter deux heures pour faire le trajet. Nous essayons de discuter mais ce n’est pas évident et souvent nous en restons à des banalités.

L’aéroport Kazumu, bien qu’international, n’est pas très fréquenté. On ne risque pas d’y rencontrer la cohue comme à Orly ou Roissy, surtout en arrivant bien avance comme moi. D’ailleurs aujourd’hui, il n’est prévu que trois vols « internationaux » et trois domestiques. Autant dire que les diverses formalités sont rapidement bouclées. Ah bien sûr, la carte Flying Blue, ils ne connaissent pas là-bas ! Faudra régler cela au retour. En revanche, ils sont plutôt permissifs au niveau du poids des sacs. Une fois la taxe de départ de trente dollars acquittée, je peux franchir les contrôles policiers puis douaniers avant de rejoindre la salle d’embarquement. Comme le hall, elle est très sommaire : une boutique et demie et un café. Deux heures de vols plus tard, je suis de retour dans l’aérogare de Nairobi Jomo Kenyatta. Mais en cours de voyage, j’ai réussi à apercevoir pour la première fois le toit de l’Afrique, le Kilimandjaro perçant les nuages. Qu’il va être long d’attendre le décollage prévu à 22 heures ! Six heures à attendre dans cet aérogare toujours aussi accueillant, mais il faut faire avec et tuer le temps. Un bouquin constitue une bonne alternative. J’en ai donc gardé un à cet effet. Je profite aussi du match de rugby diffusé sur l’écran d’un café. Et puis il y a aussi quelques courses à faire.

Cette nuit, je la passerai à bord d’un Boeing de KLM, direction la capitale néerlandaise. Encore une fois, j’apprécie l’équipement de l’avion : chacun bénéficie d’un écran personnel avec un large choix de programmes et de films ! Mais vu l’heure, je n’en profite que peu, surtout que je n’ai personne à côté : c’est plus pratique pour dormir ! La nuit est vraiment très courte, surtout après un réveil vers les 3h30-4h pour le petit déjeuner avant l’atterrissage ! 5h30, Amsterdam Schipol s’éveille : l’aérogare désert commence à se remplir. Arrivé au hall dédié aux vols européens, c’est le retour à la réalité française : tout un présentoir de journaux français ! Loin de tout, on est vraiment déconnecté de l’actualité. Plus que quelques minutes et nous pourrons repartir vers Paris ; erreur, malgré un avion présent en avance, les autorités décrètent une nouvelle vérification des bagages pour raison de sécurité, tout ça sous la pluie, pendant que nous patientons dans l’avion !

Enfin, je parviens finalement à Roissy, un peu inquiet sur la présence de mon sac à bord de l’avion : avec un voyage si long et autant d’attente à Nairobi, j’ai de gros doutes. Mais après de longues minutes d’attente devant le tapis, il finit par apparaître, légèrement humide ! Voilà le voyage est vraiment terminé et je peux rejoindre le RER pour retrouver mon nid douillet !